Evaluation des performances techniques et économiques du Biodiesel à base de ricin commun (Ricinus communis L.) en complément au Pétrodiesel

RESUME

Cette expérience a consisté à la transformation du ricin commun dans la production d’un biocarburant de qualité pour pallier aux problèmes de rareté de carburant dans le pays. Pour arriver à ce point, cinq formulations ont été effectuées suivant les proportions de biodiesel dans le mélange : BD20 (20 % de Biodiesel et 80 % de Pétrodiesel), BD30, BD40, BD50 et BD100. Après cela, le pétrodiesel commercial pris comme témoin (BD00), le biodiesel pur produit et les formulations obtenues ont été soumis à des analyses physico-chimiques selon des méthodes internationalement reconnues telles que la densité (AFNOR T 60 214), le point d’éclair (ASTM D93-11) et la viscosité (Loi de Stokes). Ensuite, des tests de performance techniques ont été effectués sur les formulations dans le moteur d’une génératrice et comparé au témoin en tenant compte de la facilité de démarrage, de l’intensité du bruit émis par le moteur, de la couleur de la fumée produite par le moteur, de la quantité de fumée émise par le moteur, de la tension du courant générée et du débit de consommation du moteur. Enfin, une évaluation économique du biodiesel produit a été réalisée en comparant son coût de production au prix du pétrodiesel du commerce. Les résultats des analyses physico-chimiques et ceux des tests de performances ont montré que sur le plan technique, le biodiesel est utilisable. Par contre, l’analyse économique a montré que le biodiesel produit à partir de l’huile de ricin n’est pas rentable. Toutefois, d’autres essais peuvent être effectués à partir d’autres huiles comme celles de fritures usées sans valeurs économiques ou de Jatropha.

Mots clés : Ricin commun, biodiesel, transestérification, pétrodiesel, Gaz à Effet de Serre.

Introduction

Le pétrole occupe une place importante dans la vie des terriens. Les statistiques montrent que plus de 110 milliards de litres de produits pétroliers raffinés ont été utilisés à travers le monde. Ce produit fossile, non renouvelable, est utilisé dans plusieurs domaines : la production d’électricité, l’agriculture, le transport, le chauffage des maisons pour ne citer que ceux-là (Inc., 2007).

Aujourd’hui, le monde fait face à de grands problèmes liés à l’énergie. De grandes questions se posent et les gouvernements de différents pays commencent à s’inquiéter. De plus, l’accroissement de la démographie mondiale augmente la pression sur le pétrole, ce qui provoque une réduction considérable des réserves pétrolières (Inc., 2007). Parallèlement, il y a aussi une forte émission de gaz à effet de serre (GES) dans l’atmosphère résultant de l’utilisation du pétrole, considérés comme polluants écologiques (ABDELKRIM & BOUDJEMAA, 2015).

La rareté que subit le pétrole provoque une augmentation du prix des barils et cette rareté touche de l’autre côté les producteurs qui se trouvent confrontés à une crise de revenus assez grave (Inc., 2007).

Plusieurs pays en voie de développement sont aujourd’hui à la recherche d’une alternative aux énergies fossiles afin d’avoir une stabilité énergétique. Pour ce faire, ils utilisent des produits agricoles pour produire du biocarburant couramment appelé agro-carburant (Oliviera, 2007). Ainsi, des pays comme l’Inde, la Chine, le Brésil, etc… se  lancent dans la production de ricin pour palier à cette situation (DUMEIGNIL, 2012). L’utilisation du ricin pour la production de biocarburant se révèle un moyen efficace dans la lutte pour une sécurité énergétique. Le ricin a été choisi car son rendement en huile avoisine les 100 % (ABDELKRIM & BOUDJEMAA, 2015). De plus, le carburant issu de l’huile de ricin est 100 % bio. Cela dit, c’est un biodiesel non polluant (Dunn, 2003).

Toutefois, l’huile de ricin coûte très chère, surtout en Haïti, par le fait que son extraction n’est pas réalisée à l’échelle industrielle. Ce qui traduit un niveau très faible de la production et donc une hausse du prix du litre d’huile extraite.

N’ayant pas exclu de ce cercle désastreux, Haïti fait face à des crises liées à l’énergie pour la décennie (2010-2020) car le pays a importé environ 7 millions de gallons de carburants (gazoline et diesel) estimant à environ 94 millions de dollars, soit 113 milliards de gourdes. Ce qui provoque une balance économique annuelle déficitaire pour le pays et donc une dépréciation à outrance de sa monnaie (VANT-BEF-INFO, 2020). Et la majeure partie du pétrole importée en Haïti est destinée au transport routier. En outre, le pays fait face à des crises d’approvisionnement récurrent durant ces cinq dernières années. Est-ce pourquoi cette étude se propose d’évaluer les performances techniques et économiques d’un biodiesel produit à partir de l’huile de ricin et mélangé au pétrodiesel ?

Ainsi, le biodiesel a été produit et mélangé au petrodiesel. Ensuite des évaluations ont été réalisées sur les différents échantillons effectués.

Ce présent travail a pour objectif de proposer un carburant alternatif à la population afin de pallier à la rareté dans le pays et contribuer à la préservation de l’environnement. L’intérêt majeur de cette étude est qu’elle pourra contribuer à la réduction des gaz à effets de serre due aux pétrocarburants et également à la mise en place d’une énergie alternative pour pallier au problème de rareté de carburant dans le pays. Ainsi, il y a de forte probabilité que le biodiesel produit à partir de l’huile de ricin et mélangé au pétrodiesel ne présente pas de différence dans le fonctionnement du moteur.

Méthodologie

La présente étude s’est proposée de réaliser un biocarburant (biodiesel) afin d’apporter une solution sur la rareté de carburant qui ne cesse de planer sur le pays, sur les grandes dépenses effectuées pour l’importation du pétrodiesel dans le pays et enfin pour la protection de l’environnement. Pour ce faire, le biocarburant a été produit à partir de l’huile  de ricin extrait à chaud, d’alcool 95° (éthanol) et une base (hydroxyde de sodium) comme catalyseur. Ensuite plusieurs formulations ont été adoptées en mélangeant le biodiesel produit avec le pétrodiesel commercial. Enfin, la performance de ces différentes formulations a été testée dans un moteur diesel.

Cadre physique de l’étude

L’ensemble des opérations visant la production, le conditionnement, l’analyse physico-chimiques et les tests d’évaluation du biodiesel produit a été réalisé dans les locaux de la FAMV.

Matériels

Pour la réalisation de ce travail, l’huile de ricin, l’éthanol 95°, la soude caustique et l’eau distillée ont été utilisées. D’autres matériels ont également été utilisés pour l’analyse des paramètres physico-chimiques et le test de performances des différents échantillons.

Méthodes

La production du biodiesel a nécessité la transestérification basique de l’huile de ricin par voie homogène. Elle a été réalisée avec un ratio huile/alcool de 4/1 et une masse de NaOH comme catalyseur correspondant à 1 % du poids de l’huile utilisée. Ainsi, 12 l d’huile de ricin ont été chauffées à 60 °C pendant 2 heures. Après le chauffage, 120 g de soude caustique (NaOH) dilué dans 3 l d’éthanol (CH3-CH2OH) y ont été ajouté. Le mélange ainsi constitué a été agité pendant 30 minutes.

Après le temps d’agitation, le mélange a été laissé au repos pendant 24 heures pour que la séparation s’effectue. Après la séparation du mélange, il y a eu deux phases : la glycérine et le biodiesel brut. Etant plus dense que le biodiesel, la glycérine s’est précipitée et a été récupérée en premier.

Le biodiesel brut a été purifié par lavage à 3 l d’eau distillée afin d’éliminer l’excès d’alcool et de catalyseur. Ensuite, le mélange a été à nouveau laissé au repos pendant 6 heures et le biodiesel a été récupéré par décantation. Le produit ainsi obtenu a été chauffé à 100 °C pendant une heure pour éliminer par évaporation les traces d’eau et d’alcool encore présentes afin d’obtenir le biodiesel pur souhaité.

 Huile de ricin + Alcool (CH3-CH2OH) + Catalyseur (NaOH) → Glycérine + Biodiesel.

Echantillonnage

Après avoir produit le biodiesel, cinq (5) formulations codées BD100, BD50, BD40, BD30 et BD20 ont été constituées et répétées trois (3) fois chacune. Pour cela, 9,8 l de biodiesel pur (BD100) et 18,2 l de pétrodiesel commercial (BD00) pris comme témoin ont été utilisés pour l’élaboration des formulations.

Evaluation des performances physico-chimiques du biodiesel produit

Les paramètres physico-chimiques retenus pour l’analyse du biocarburant sont la densité, le point d’éclair et la viscosité dynamique. En outre le rendement de la production du biodiesel de ricin a également été déterminé.

Rendement de la production du biodiesel de ricin

-            Le rendement de la production a été calculé par la formule de HUAYANG :

-          La densité a été déterminée selon la méthode AFNOR T 60 214 par la formule suivante (WOLFF, 1968) :

-          Le point d’éclair pour les carburants a été déterminé selon la méthode ASTM D93-11 où les échantillons ont été chauffés doucement à un rythme constant d'élévation de température et avec une agitation continuelle. À chaque degré d'augmentation de température, une flamme a été introduite dans la vapeur produite au-dessus de l'échantillon. La plus basse température à laquelle les vapeurs issues du carburant s'enflamment a été considérée comme le point d'éclair de ce carburant (CENTRE D’EXPERTISE EN ANALYSE ENVIRONNEMENTALE, 2016).

-          La viscosité dynamique du biocarburant a été calculée par la loi de Stokes (Karolan, 2017) :

Evaluation des performances techniques du biodiesel produit

Chaque échantillon a été testé et comparé au témoin (BD00) pour apprécier leur performance. Pour cela, une enquête a été effectuée auprès de cinq mécaniciens experts travaillant dans une entreprise de réparation de génératrice à moteur diesel reconnue par l’état haïtien afin de retenir les critères d’évaluation du produit.

Pour la réalisation de ce test, une perceuse électrique et une génératrice de moteur diesel, de marque ATLAS de model 168FAE avec une puissance de 6,3 à 6,8 kW, générant une tension électrique de 110 à 220 V et un courant de 57,27 à 30,91 A a été choisie. Ce choix a été fait parce qu’avec la génératrice, le reste de carburant testé peut être facilement éjecté du moteur à la fin du test.

Lors du test, un panel constitué de cinq mécaniciens et chauffeurs a été mis en place et chaque membre du panel a reçu un questionnaire dont la mission a été de répondre à quelques questions posées dans le questionnaire à chaque échantillon testé. La quantité de carburant à utiliser a été de 1 litre pour chaque répétition dans les formulations et pour le témoin. Chaque formulation a été testée pendant une durée de 5 minutes.

Les critères qui ont été retenus pour l’évaluation de la performance techniques des différents échantillons de biodiesel ainsi que le témoin sont le niveau de facilité de démarrage de la génératrice, l’intensité du bruit effectué par la génératrice, la couleur de la fumée produite par la génératrice, la quantité de fumée émise par la génératrice, la tension du courant générée aux bornes des prises de la génératrice et le débit de consommation de la génératrice.

Evaluation des performances économiques du biodiesel produit

L’évaluation économique du biodiesel consiste à faire une comparaison entre le coût de production du biodiesel produit et le prix du pétrodiesel au niveau des stations d’essence.

Pour mieux appréhender cette comparaison, une analyse du coût de production du biodiesel produit a été réalisée. Toutefois, les dépenses pour les emballages et les salaires des travailleurs n’ont pas été pris en compte dans le cadre de ce calcul de coût de production.

Analyse statistique et traitement des données

La saisie, le traitement et l’analyse statistique des données provenant de l’analyse des paramètres physico-chimiques et du test des échantillons dans la génératrice ont été réalisés à l’aide du pack logiciel Microsoft Office de version 2013.

Une analyse de variance (ANOVA) a été effectuée pour déceler la différence significative existante entre les résultats obtenus pour l’analyse des paramètres physico-chimiques pour les différents échantillons comparés au témoin.

Un test de comparaisons multiples de moyenne par la méthode de ppds de Fisher a été également effectué pour comparer la différence significative de moyenne entre les résultats obtenus pour l’analyse des paramètres physico-chimiques des échantillons et ceux du témoin en utilisant cette formule :

Dans le cas où il y a différence significative entre les échantillons et le témoin, des niveaux comme a, b, c, d, e et f ont été affectés à chaque échantillon pour prouver la différence existante.

Les données provenant du test de performance du moteur face aux différents échantillons ont été analysées en prenant la moyenne des informations recueillies auprès des cinq mécaniciens et chauffeurs qui ont participés au déroulement du test.

Les données provenant de la comparaison entre le prix du pétrodiesel et le résultat issu du calcul du coût de production du biodiesel produit ont été analysées par simple comparaison de nombre.

Résultat

Cette expérience vise à la comparaison des moyennes de chaque paramètre physico-chimique du biodiesel et des formulations par rapport au pétrodiesel commercial. Et également l’évaluation des différentes formulations élaborées à partir du pétrodiesel commercial. Les résultats des analyses des paramètres physico-chimiques sont présentés dans le Tableau 1. Ce Tableau donne la densité des différents échantillons,  leur point d’éclair exprimé en °C et leur viscosité exprimée en mm2/s. Les résultats des analyses de la performance technique du biocarburant dans le moteur de la génératrice sont présentés respectivement dans les Tableaux 2, 3, 4 et 5 et dans les figures 1 et 2. Les figures 1 et 2 quant à elles présentent respectivement la tension du courant générée par la génératrice et le débit de consommation du moteur de la génératrice exprimé en l/h. Les résultats issus du calcul du coût de production du biodiesel produit sont présentés dans le tableau 6.

Tableau 1 : Densité, point d'éclair et viscosité des échantillons


La même lettre inscrite en exposant dans une même ligne indique qu’il n’y a pas de différence significative au seuil de 5 % entre les échantillons pour le paramètre concerné.

Les valeurs sont les moyennes ± les écart-types de trois mesures (n = 3).

Légende : Témoin (BD 00) : Pétrodiesel pur non mélangé au Biodiesel.

 BD20 : Mélange contenant 20 % de biodiesel et 80 % de pétrodiesel.

 BD30 : Mélange contenant 30 % de biodiesel et 70 % de pétrodiesel.

 BD40 : Mélange contenant 40 % de biodiesel et 60 % de pétrodiesel.

 BD50 : Mélange contenant 50 % de biodiesel et 50 % de pétrodiesel.

 BD100 : Biodiesel pur non mélangé au Pétrodiesel.

Tableau 2 : Niveau de démarrage de la génératrice


Tableau 3 : Intensité du bruit du moteur de la génératrice en absence et en présence de charge


Tableau 4 : Couleur de la fumée produite par la génératrice en absence et en présence de charge


Tableau 5 : Quantité de fumée produite par la génératrice en absence et en présence de charge


Figure 1 : Histogramme de la tension du courant générée par la génératrice

Figure 2 : Histogramme du débit de consommation de la génératrice

Tableau 6 : Coût de production de biodiesel


Discussions

12 l d’huile de ricin ont été transestérifiées par voie homogène par catalyse basique pour donner 11,8 l de biodiesel pur, ce qui donne un taux de conversion de 98,33 %. Ce rendement obtenu est voisin de celui trouvé par (Lounis, 2013) soit 98 %. Cette quantité de 200 g d’huile n’ayant pas transformée en biodiesel a été transformée de préférence en glycérine. Le taux de conversion obtenu est légèrement plus élevé que celui obtenu par Lounis en 2013. Ce qui traduit que le rendement obtenu est dans la fourchette acceptable.

Les différentes formulations du biodiesel ont une densité moyenne plus élevée que le pétrodiesel et qui accroit en fonction de la proportion du biodiesel produit dans le mélange. Cette croissance de la densité en fonction de la proportion du biodiesel produit serait due à la densité élevée du biodiesel produit qui, mélangé avec le pétrodiesel, augmente automatiquement la densité des différents mélanges. L’élévation de la densité du biodiesel produit pourrait être due à la variété de ricin utilisée dont la densité de son huile est faible. De plus, le niveau faible de la densité du pétrodiesel serait attribuable à un raffinage poussé du pétrole, une telle opération qui n’est pas utilisée dans la production du biodiesel. La densité moyenne du biodiesel produit est significativement différente de celle des différentes formulations et du pétrodiesel. Une telle différence serait due à la proportion du biodiesel pur produit présent dans chaque formulation.

Les différentes formulations du biodiesel ont un point d’éclair moyen plus élevé que le pétrodiesel et qui augmente en fonction de la proportion du biodiesel produit dans le mélange. Cet accroissement du point d’éclair serait dû à la présence du biodiesel étant moins inflammable que le diesel pétrolier car celui-ci s’enflamme plus facilement que le biodiesel produit. Les points d’éclair moyens du biodiesel produit, des différentes formulations et du pétrodiesel ne sont pas significativement différents.

Les différentes formulations du biodiesel ont une viscosité moyenne plus élevée que le pétrodiesel et qui accroit en fonction de la proportion du biodiesel produit dans le mélange. Cette augmentation de la viscosité serait due à la présence du biodiesel produit qui est plus lourd donc plus visqueux que le pétrodiesel car celui-ci, étant à un niveau de raffinage élevé qui lui confère une viscosité très faible, donc s’écoule plus facilement que le biodiesel produit. Les viscosités moyennes du biodiesel produit, des différentes formulations et du pétrodiesel sont significativement différentes. Par contre, il n’y a pas de différence significative entre la viscosité moyenne des formulations (BD50 ; BD40) et (BD30 ; BD20).

Avec le pétrodiesel pur (BD00), les formulations BD20, BD30 et BD40, le moteur de la génératrice démarre plus facilement qu’avec la formulation BD50 et le biodiesel pur (BD100). Cette légère difficulté de démarrage du moteur de la génératrice en présence de la formulation BD50 et du biodiesel pur produit serait due à l’élévation de leur point d’éclair et de leur viscosité au-dessus des autres car ils prennent beaucoup plus de temps à s’enflammer dans le moteur et affichent une résistance beaucoup plus grande à l’écoulement, c’est-à-dire qu’ils coulent plus lentement que les autres.

Avec le pétrodiesel pur (BD00) et la formulation BD20, le moteur de la génératrice émet un bruit moins intense en présence ou non d’appareils électriques qu’avec les autres formulations. L’augmentation du bruit émis par le moteur de la génératrice serait attribuable à la viscosité et à la densité élevée du biodiesel pur produit. L’augmentation du bruit pourrait avoir des conséquences plus ou moins à long terme sur la durée de vie du moteur.

Avec le pétrodiesel pur (BD00) et la formulation BD20, le moteur de la génératrice produit une fumée de couleur beaucoup moins intense en présence ou non de charges qu’avec les autres formulations. La présence ou non d’appareils électriques sur le moteur n’a aucune influence sur la couleur la fumée produite par le moteur de la génératrice. L’intensité de la couleur de la fumée produite par le moteur de la génératrice serait attribuable à l’élévation de la viscosité du biodiesel pur produit présent dans les formulations. La couleur de la fumée est un indicateur de mauvais fonctionnement du moteur.

La couleur de la fumée produite par le moteur de la génératrice a été interprétée en fonction de son niveau d’intensité et elle varie de blanc à noir foncé suivant ce tableau :

Tableau 7 : Niveau d’intensité de la couleur de la fumée produite par la génératrice


Pour quel que soit l’échantillon de biocarburant, la quantité de fumée émise par le moteur est très peu influencé. La quantité de fumée émise par le moteur de la génératrice ne diffère pas en présence ou non d’appareils électriques. Ainsi, les paramètres physico-chimiques n’ont aucune influence sur la quantité de fumée émise par le moteur de la génératrice.

En présence de charges, la tension du courant générée aux bornes des prises de la génératrice diminue pour quelle que soit la formulation utilisée. Avec la formulation BD30, la génératrice émet une tension plus élevée en présence ou non de charges qu’avec les autres formulations. Ce qui laisse croire que la génératrice fonctionne mieux avec la formulation BD30.

La consommation du carburant augmente en fonction de la viscosité du carburant utilisé. Il y a un doute sur la consommation du biodiesel pur produit en présence de charges car ce dernier devrait être consommé beaucoup plus que les autres formulations. C’est probablement dû à des pertes lors de la manipulation. La consommation excessive de carburant par le moteur d’un véhicule ou d’une génératrice pourrait être causée soit par une utilisation prolongée du moteur, soit par l’absence de régularité de la vidange d’huile ou le non changement de pièces. La consommation excessive de carburant est un indicateur de mauvais fonctionnement ou de faiblesse du moteur.

Pour produire 11,8 l de biodiesel, il a fallu acquérir 21 000 gourdes de matières premières. Le coût d’un gallon de biodiesel revient à environ 6 730,77 gourdes. Or actuellement, dans le commerce, le gallon de pétrodiesel en Haïti coûte 353 gourdes. Ce qui prouve que même si le gallon du biodiesel est vendu au seuil du coût de production (soit 6 730,77 gourdes), la différence de prix existante entre ces deux carburants reste très élevée soit 19 fois plus élevé pour le biodiesel.

Ainsi, les valeurs sont très élevées par l’achat des matières premières en détail. Cette étude n’est donc pas rentable devant un prix à la pompe de 353 gourdes le gallon. Cependant, la concurrence peut être possible en apportant divers suggestions liées à la vulgarisation du ricin. Même avec cette élévation du coût, le biodiesel (produit à partir de l’huile de ricin) compte différents avantages pouvant provenir de la valorisation de ses sous-produits (de la cueillette jusqu’à l’obtention du carburant) tels que :

- Tiges, feuilles, coques des graines qui peuvent être utilisées comme des engrais organiques et aussi comme combustibles ;

-  Les tourteaux qui peuvent être utilisées en alimentation animale après détoxication, pour l’enrichissement des sols (comme engrais) et comme combustibles.

-  La bioglycérine qui peut être utilisée par les industries de cuir, de savon et de cosmétiques.

Ce qui signifie qu’il n’y a pas de déchets (zéro déchets). Ainsi, le biodiesel nous offre une vie sans pollution dans un environnement sain. Le biodiesel peut être produit à partir de n’importe quelle huile (animale ou végétale).

Conclusion

Cette étude a été réalisée dans le but de proposer une alternative de carburant pouvant contribuer à la lutte contre la rareté dans le pays et la préservation de l’environnement en utilisant le ricin commun « Ricinus communis L. » comme matière première. Le biodiesel a été produit en faisant la transestérification de l’huile de ricin, ensuite la récupération et la purification du biodiesel brut obtenu.

Cinq formulations constituées de biodiesel pur produit et de pétrodiesel pris comme témoin ont été préparées afin de trouver une formulation optimale proche du témoin. Les formulations ont été basées sur la variation de la proportion du biodiesel dans le mélange allant de 0 % à 100 %.

Des analyses physico-chimiques comme la densité, le point d’éclair et la viscosité ont été réalisées sur les six échantillons de carburants (BD00, BD20, BD30, BD40, BD50 et BD100) et suivies d’autres tests concernant les performances de ces échantillons dans le moteur d’une génératrice.

Les résultats des analyses physico-chimiques et des tests de performance ont montré que sur le plan technique, le biodiesel est utilisable. Donc, le biodiesel produit à partir de l’huile de ricin ne présente pas de danger significatif pour le moteur d’une génératrice ou d’un véhicule. Le biodiesel de ricin présente un rendement de 98,33 % dans les conditions expérimentales (température de réaction de 60 °C et un rapport huile/alcool de 4/1).

Le biodiesel produit avec un coût de production de 6730,77 gourdes est de loin plus cher que le pétrodiesel qui coûte 353 gourdes sur le marché local, soit une différence de prix 19 fois plus élevée pour le biodiesel. Par contre, cette expérience consistait à produire un carburant capable de substituer au carburant fossile. L’expérience est faisable techniquement bien qu’elle ne l’est pas économiquement, mais l’huile de ricin peut tout de même être remplacée par d’autres qui sont moins chers comme l’huile de Jatropha ou les huiles de fritures usées sans valeurs économiques.

Cette étude révèle donc d’une importance énorme. Les résultats obtenus peuvent constituer de sources de données et d’informations pertinentes non seulement pour les travaux qui seront ultérieurement réalisés, mais également pour toutes industries qui choisissent d’œuvrer dans le domaine de l’énergie et plus précisément dans la production de biocarburant « biodiesel ». D’autres expériences sont vivement encouragées pour voir s’il est possible de réaliser, à intérêt économique, d’autres carburants à base d’huile de ricin ou de n’importe quelle autre huile.

En vue de rendre possible la concurrence du biodiesel avec le pétrodiesel, divers recommandations liées à sa vulgarisation ont été faites, telles que :

- Opter pour une production à grande échelle ;

-      Subventionner la production ;

-  Instaurer un accord d’achat en gros des matières premières avec les industries productrices (de chaque produit).

-  Utiliser des huiles de fritures usées sans valeurs économiques ou l’huile de Jatropha en alternative au ricin.

Promouvoir un contrôle régulier et permanent tout au long du processus de production pour éviter le mélange du carburant à d’autres substances.

-  Valoriser les déchets issus de la plante comme engrais organique, combustibles et aliment pour le bétail après détoxication.

Conflit d’intérêt

Nous déclarons qu’il n’y a aucun conflit d’intérêt entre les auteurs de cet article.

Contributions des auteurs

DL a produit le biocarburant, formulé les échantillons et les a analysé. YP et DL ont analysé la performance du biocarburant et rédigé l’article. YP a supervisé tous les activités menées et a revu et corrigé l’article.

Remerciements

Nous remercions le Laboratoire de Chimie de la Faculté d’Agronomie et de Médecine Vétérinaire de l’Université d’Etat d’Haïti pour la production et l’analyse des échantillons de cette étude ainsi que le test de la performance du carburant.

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